CREDAM, Centre de Recherches sur l'EDucation aux Médias
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L'éducation aux médias
définitions et problématiques,
quelques exemples
Qu'est-ce que l'éducation aux médias? 

"Comme toute entreprise nouvelle, l'éducation aux médias en Grande Bretagne a été caractérisée par une très grande prétention quant aux buts à atteindre. On affirme souvent qu'elle peut apporter de profonds changements politiques, à la fois dans la conscience des étudiants et dans les programmes scolaires. Cet enthousiasme militant n'est pas mauvais en soi, mais les éducateurs chargés des médias sont de plus en plus convaincus qu'une telle prétention est bien peu fondée et que l'enseignement et l'étude des médias posent beaucoup plus de problèmes que leurs défenseurs voudraient nous le faire croire".
David Buckingham, Valeria Hey, Gemma Moss, "Repenser le savoir télévisuel", in L'éducation aux médias dans le monde : nouvelles orientations(coord. C. Bazalgette, E. Bevort, J. Savino, Clemi, 1992.
 

"Les raisons qui ont poussé au développement de l'éducation aux médias en Amérique latine sont plus sociopolitiques, culturelles, éthiques et religieuses que liées aux sciences de la communication. Voilà pourquoi il est très difficile de classer les expériences latino-américaines suivant une typologie restreinte aux théories de la communication ou aux théories concernant l'influence des médias. Les considérations théoriques sont très fréquemment mêlées de motivations politiques et culturelles et les centres d'intérêt des initiatives varient selon ceux qui les appuient".
Valerio Fuenzalida, "L'éducation aux médias en Amérique latine, développements de 1970 à 1990", in L'éducation aux médias dans le monde : nouvelles orientations(coord. C. Bazalgette, E. Bevort, J. Savino, Clemi, 1992.

"En France, des institutions se révèlent particlièrement actives : l'Institut du langage total, par exemple, à Saint Etienne, sous l'impulsion d 'Antoine Vallet, met en avant, dans les années 1960, l'idée de "langage total" et propose une éducation aux médias fondée sur une vision globale des médias, sur une conscience des correspondances des arts visuels : peinture, cinéma, télévision, photo-reportage, publicité, etc. A Bordeaux, le Centre régional de documentation pédagogique, dirigé par René La Borderie, inscrit en priorité une action d'Introduction à la communication et aux médias (Icom) inspirée d'approches rigoureuses de sémiologie et de sciences du langage. De même la radio télévision scolaire, sous l'impulsion d'Henri Dieuzeide, proposera de multiples émissions de radio et de télévision pour apprendre à décrypter les médias.
Devant l'abondance et les diversités de ces cheminiments institutionnels, il est fructueux de s'arrêter un instant sur le travail de l'Unesco qui , dès sa création, a tout fait pour promouvoir l'éducation aux médias.
On constate en effet, que si l'implication des responsables de cette organisation ne s'est jamais démentie, les essais de définition de l'objet de cette éducation varient en fonction de filtres, de priorités qui changent en permanence. A l'Unesco, comme au Conseil de l'Europe, ces fluctuations sont repérables à la lecture de la planification des actions. Certes, il est aisé de comprendre que les experts en charge de ces programmes n'aient plus porté le même regard sur les besoins en éducation du monde des années 1980 que dans les années 1960. Mais il ne s'agit pas de variations légères. En fait, c'est l'angle d'attaque de la réflexion sur les médias et sur l'éducation qui diffère.
Dans une première phase en effet, vers le milieu du xxème siècle, les experts se sont interrogés sur les moyens d'utiliser la communication de masse, notamment la télévision, à des fins éducatives. Leur problématique pourrait se résumer dans les termes suivants : pourquoi ne pas profiter des médias pour alphabétiser à grande échelle des populations privées de structures d'enseignement ? A cette éducation, fondée sur l'utilisation des médias (on fait alors de l'éducation par les médias ou avec les médias qui illustrent des disciplines traditionnelles, les rendent plus attrayantes), se substituera, dans les années 1970, une autre définition d'une visée différente, élaborée par le Conseil international du cinéma et de la télévision : "Par éducation aux médias, il convient d'entendre l'étude, l'enseignement et l'apprentissage des moyens modernes de communication et d'expression considérés comme faisant partie d'un domaine spécifique et autonome de connaissances dans la théorie et la pratique pédagogique à la différence de leur utilisation comme auxiliaires pour l'enseignement et l'apprentissage dans d'autres domaines de connaissances tels que des mathématiques, de la science et de la géographie". Nous sommes alors en 1973.
Quelques années plus tard, en 1979, à l'Unesco, une nouvelle définition cherche à embrasser l'ensemble du phénomène. L'éducation aux médias reflètera "toutes les manières d'étudier, d'apprendre et d'enseigner à tous les niveaux(...) et en toutes circonstances l'histoire, la création, l'utilisation et l'évaluation des médias en tant qu'arts pratiques et techniques, ainsi que la place qu'occupent les médias dans la société, leur impact social, les implications de la communication médiatisée, la participation, la modification du mode de perception qu'ils engendrent, le rôle du travail créateur et l'accès aux médias". Ce n'est pas être irrévérencieux que de juger particulièrement confuse cette définition...
Des contributions pourraient être ajoutées, émanant d'autres institutions, de groupes de recherche, d'auteurs. A chaque fois, l'idée est de mieux décrire, de mieux cerner l'objet "éducation aux médias". L'intention est louable. Le résultat n'est guère convaincant. Peut-être peut-on, dès lors, faire l'hypothèse que s'il est si difficille de circonscrire cette idée, c'est parce que l'on cherche à conjuguer des niveaux différents. D'un côté, on affirme que l'école doit prendre acte d l'émergence des médias dans la société, qu'elle doit se situer, notamment dans son rôle fondamental par rapport au savoir. Et sur ce point, tout le monde est d'accord. Mais en revanche les solutions proposées ne sont en aucun cas consensuelles. Bien au contraire, elles révèlent les clivages, les imaginaires, les paris sur l'avenir qui nous renvoient à des débats classiques, notamment d'ordre politique.
Cette expression, aujourd'hui consacrée, "d'éducation aux médias" a en outre un inconvénient majeur. Héritée de la langue anglaise, traduite littéralement sans se soucier des connotations induites, elle s'avère assez énigmatique. Il suffit pour s'en convaincre de décliner ce mot à mot : quand parle-t-on, dans les systèmes éducatifs, d'une "éducation à..."?
Les enfants disent-ils : "je vais en éducation au français, je vais en éducation aux mathématiques"?
Il y a plus gênant : "éduquer à" sous-entend que l'objet "média" est à "éduquer". Est-ce cela que l'on veut dire ? Mais ne confond-on pas dans ce cas un objet et son utilisation ? Quelle serait alors la validité d'une telle éducation?
Bref, "éduquer aux médias" n'est pas un concept facile à comprendre. Accusateur des médias pour les uns, incitateur pour les autres à les utiliser sans retenue pour vivre un nouvel âge de la communication, son emploi si universel vient d'abord d'un imaginaire qui autorise chacun à l'investir dans le sens qu'il souhaite".
Jacques Gonnet, Les controverses fécondes, Hachette Education, Paris, 2002, p 9-11.

 

"Des définitions différentes ont été formulées à Toulouse par des participants venus d'Asie, d'Afrique et dAmérique latine. Voici l'une d'elle : "L'éducation aux médias est une pratique et un processus éducatifs destinés à permettre aux membres d'une collectivité de participer de façon créative et critique (au niveau de la production, de la distribution et de la présentation) à l'utilisation des médias technologiques et traditionnels, afin de développer et libérer les individus et la collectivité et de démocratiser la communication". Une telle définition va dans le sens d'une éducation aux médias plus significative tout au moins dans le contexte des pays en voie de développement. Il est évident que toutes les sociétés de ces pays ne sont pas identiques et que leurs besoins d'information, leurs expériences médiatiques et culturelles diffèrent d'une région à l'autre. Il faudra donc adapter les définitions, les objectifs et les stratégies aux besoins locaux et aux moyens disponibles."
Keval J. Kuvar, "Une nouvelle définition des objectifs, réflexions venues de l'Inde", in L'éducation aux médias dans le monde : nouvelles orientations (coord. C. Bazalgette, E. Bevort, J. Savino, Clemi, 1992.

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