L'enquête
que nous avons menée a pris place de novembre
1999 à mai 2000. Cette période correspond
à ces six mois pendant lesquels l'implantation
d'Internet dans les foyers français s'est
accélérée, en particulier autour
des fêtes de Noël. C'est en effet, avec
la rentrée scolaire, le moment où
l'on achète ou renouvelle certains équipements
familiaux.
Si le taux d'équipement et de connexion des
ménages a nettement augmenté, différents
sondages montrent que les profils d'internautes,
en revanche, semblent avoir peu évolué.
Les équipements et les profils
Nous
ne disposons pas de données précises
"officielles" concernant l'équipement des
ménages en ordinateurs connectés.
Nous sommes donc contraints de nous appuyer sur
des études conduites sur ce sujet par différents
instituts.
Les
chiffres concernant le taux de pénétration
d'Internet dans les foyers français varient
fortement d'une étude à l'autre, pour
la période donnée (22% selon Canal
Ipsos, 15% selon Médiamétrie/ISL et
32% deux mois plus tard selon le Pan European Internet
Monitor, PEIM).
Toutefois, quelque soit l'étude, la France
se situait, en février 2000, légèrement
en dessous de la moyenne européenne (qui
était de 30% selon Canal Ipsos, 34% selon
le PEIM). En revanche, les profils d'internautes
que dégagent ces enquêtes étaient
sensiblement les mêmes que dans d'autres pays
européens.
En
matière d'équipements, selon le baromètre
Multimédia Médiamétrie/ISL
d'avril 2000 :
- 23% des foyers français seraient équipés
dun micro-ordinateur (22,2% en décembre
1999),
- 7,1% des foyers disposeraient d'une connexion
à Internet (5,9% en décembre 1999).
Les foyers les plus nombreux à être connectés
appartiennent aux catégories socioprofessionnelles
favorisées (18,4%), ont au moins un enfant
de moins de 15 ans (11,1%), et habitent la région
parisienne (11,5%). Comme on le montrera par la suite,
ces caractéristiques socio-économiques
globales jouent un rôle non négligeable
sur les résultats de notre enquête.
En
ce qui concerne les pratiques, 15% de la population
française des 15 ans et plus se déclarent
internautes (soit une augmentation de 46% entre
le printemps 1999 et le printemps 2000). Par "internautes",
le baromètre Médiamétrie/ISL
entend des individus qui se sont connectés
personnellement à Internet au moins une fois
au cours des 30 jours précédents,
dans quelque lieu que ce soit.
- Ce sont majoritairement des hommes (59,8%),
même si la part des femmes est en nette augmentation.
- Depuis le début 2000, ils se connectent
davantage au domicile (44,5%) qu'au travail (40,1%).
En revanche, 88% de la population des 15-17 ans
déclarent se connecter ailleurs qu'à
leur domicile.
- Ce sont plutôt des utilisateurs réguliers :
39,1% se connectent plus dune fois par mois.
Les utilisateurs assidus (se connectant tous les
jours ou presque) représentent 30,8% des
internautes, et les utilisateurs occasionnels (se
connectant une fois par mois et moins souvent) 30,2%.
Les 15-17 ans se situent pour une très forte
majorité parmi les internautes occasionnels.
- Ces internautes utilisent avant tout le Web
et le courrier électronique.
Les représentations
D'après
un sondage de l'institut CSA pour Le Parisien/Aujourd'hui,
en février 2000 :
- 46% des Français déclarent savoir
ce qu'est Internet, mais ne pas l'avoir encore essayé.
- 1% en ont entendu parler sans bien comprendre
de quoi il s'agit (contre 25% en mars 1999).
- 1% d'entre eux n'a jamais entendu parler de l'Internet
(contre 6% un an plus tôt).
Le système éducatif français
et les technologies de l'information et de la communication
La
situation en matière d'équipements
informatiques permettant d'intégrer les technologies
de l'information et de la communication dans les
collèges et les lycées français
est en pleine évolution.
Les statistiques régulièrement produites
par le ministère de l'Education sur l'équipement
de ces établissements marquent une amélioration
quantitative et un accroissement constant du parc
informatique et des connexions à Internet.
Cependant, les situations observées localement
sont extrêmement disparates. En 1999, l'accès
des élèves à l'outil informatique
restait fonction de l'établissement scolaire
et de la motivation des professeurs.
Les
collèges et les lycées français
ont tous été dotés d'une connexion
à Internet au cours de l'année scolaire
1998-99. L'ordinateur dédié était
destiné avant tout à la gestion administrative,
afin que les professeurs puissent accéder
à certaines informations administratives
disponibles uniquement en ligne. Il était
donc souvent placé au secrétariat
du chef d'établissement ou dans la salle
des professeurs. Utiliser Internet à des
fins pédagogiques était donc difficile,
et l'accès impossible aux élèves.
C'est
en 1999-2000, c'est-à-dire précisément
au moment où cette enquête a été
menée, que la situation s'est profondément
modifiée. Les besoins administratifs étant
couverts, l'augmentation des équipements
et des connexions a bénéficié
aux usages pédagogiques.
Equipement
des établissements scolaires français
|
Pourcentage
d'établissements
accédant à Internet
|
Nombre
moyen d'élèves par ordinateur
connecté ou non
|
Nombre
d'ordinateurs permettant un accès simultané
à Internet par établissement
|
|
octobre
99
|
juin
2000
|
octobre
99
|
juin
2000
|
octobre
99
|
juin
2000
|
Collèges
|
84,1%
|
90,5%
|
15,3
|
14,5
|
7,5
|
9,5
|
Lycées
|
95,6%
|
98%
|
7
|
6,4
|
19
|
23,5
|
Lycées
professionnels
|
92,4%
|
94,7%
|
5,1
|
4,8
|
9
|
11,1
|
Ministère
de l'Education, www.education.gouv.fr, juin 2000
Deux
ans plus tôt seulement, certaines académies
déconseillaient la mise en place de réseaux
informatiques locaux dans les collèges, compte
tenu des problèmes d'installation et de maintenance.
Aujourd'hui, les recommandations d'équipement
pour les collèges préconisent l'installation
de réseaux informatiques "qui seule peut
permettre de multiplier les échanges pédagogiques
et le travail coopératif".
Ces deux dernières années, de nombreuses
collectivités locales (régions, départements)
ont pris l'initiative d'équiper massivement
en réseaux informatiques connectés
les établissements qui dépendent de
leur compétence. La mise en place de ces
équipements s'est déroulée
surtout sur l'année scolaire 1999/2000.
L'autre
difficulté pour l'utilisation d'Internet
en milieu scolaire est le coût des communications
téléphoniques. En effet, rares sont
pour l'instant les établissements qui ont
la possibilité de se connecter par câble.
Les connexions se font essentiellement par Numeris
en lycée.
Depuis septembre 1999, des conseils régionaux
et généraux ont annoncé qu'ils
finançaient le forfait scolaire Internet
de France-Telecom (soit 380 heures de communications
téléphoniques par an) pour tous les
lycées et collèges qui les concernent.
Le forfait correspond à deux heures de connexion
par jour scolaire, ou à une demi-heure de
consultation par élève dans un collège
de taille moyenne si un ordinateur est connecté
au CDI, une heure si la connexion est partagée
entre deux ordinateurs. Bien que le nombre d'élèves
soit supérieur dans les lycées, les
connexions Numeris permettent de consulter Internet
simultanément sur plusieurs postes et favorisent
donc plus largement la consultation.
La
période sur laquelle se déroule l'étude
"Les jeunes et Internet" (décembre 1999 - mai
2000) correspond donc à un temps de mouvement,
de construction, de mise en place. Les résultats
ne fournissent qu'un instantané qui devrait
évoluer rapidement. Une situation plus stable
devrait pouvoir être observée d'ici
deux ou trois ans.

1 - Internet en France et dans le système éducatif
2 - Les objectifs de la recherche
3 - Remarques méthodologiques
4 - Caractéristiques de l'échantillon
2
- LES OBJECTIFS DE LA RECHERCHE |
Ce
travail vise à mieux connaître l'attitude
des adolescents âgés de 12 à
17 ans vis à vis d'Internet et à disposer
de données précises sur la relation
qu'ils entretiennent avec ce nouveau média.
Il s'agit de:
- récolter des données sur leurs
opinions et leurs représentations autour
de quatre thèmes: le "phénomène"
Internet, les contenus en ligne, la technologie
et l'avenir d'Internet, que les jeunes aient, ou
non, déjà utilisé Internet,
- de décrire des modes et contextes
de son utilisation, en particulier à la maison
et dans les établissements scolaires,
- d'identifier des comportements d'usage, autour
de cinq dimensions: les types d'usage développés,
les contenus des sites visités, les comportements
de navigation, les modalités de l'usage et
le rôle des réseaux sociaux.
Les
observations recueillies devraient permettre de
dépasser les discours spéculatifs
simplistes et offrir une alternative à l'argumentaire
commercial des entreprises enquêtant sur le
sujet.
Cette
recherche est avant tout destinée à
approfondir la réflexion sur l'éducation
aux médias, Internet inclus. Nous souhaitons
qu'elle contribue à favoriser l'apprentissage
scolaire des technologies de l'information et de la
communication et à faire naître de nouvelles
pratiques pédagogiques qui s'appuient sur les
représentations et les connaissances que les
élèves ont réellement d'Internet.

1 - Internet en France et dans le système éducatif
2 - Les objectifs de la recherche
3 - Remarques méthodologiques
4 - Caractéristiques de l'échantillon
3
- REMARQUES MÉTHODOLOGIQUES |
Conditions
d'expérimentation
L'enquête
"Internet et les jeunes" a été effectuée
en France auprès de 524 élèves.
La population de cette enquête a été
déterminée en croisant plusieurs critères -le
lieu géographique, les niveaux scolaires,
les types d'établissements scolaires- de
façon à obtenir des données
comparables à celles des autres pays concernés
par l'étude.
Pour
la France, deux lieux géographiques ont été
retenus: Paris (intra muros) et La Rochelle, c'est-à-dire
une très grande ville où Internet
est bien implanté, et une ville moyenne dynamique
dans ce domaine. Le choix de deux villes mieux équipées
que la moyenne française nous a permis de
recueillir un meilleur taux de réponses exploitables,
notamment en ce qui concerne les usages d'Internet.
Cinq
niveaux scolaires ont été concernés:
de la classe de cinquième en collège
à la classe de première en lycée.
Les élèves avaient entre 11 et 19
ans. Pour les entretiens, trois niveaux ont été
conservés, les classes de cinquième,
de troisième et de première. Ces niveaux
permettent de constater des différences liées
à l'âge et aux programmes scolaires
au sein du pays, tout en étant comparables
d'un pays à l'autre.
Pour
les établissements scolaires, nous souhaitions
pour chaque niveau nous appuyer sur deux établissements
différents, retenus en fonction de leur population
scolaire et de leur équipement informatique.
Répartition
des établissements scolaires
Paris
|
La
Rochelle
|
Ecole
TICE
collège-lycée
Camille-Sée
[1à5]
|
Ecole
non-TICE
collège-lycée
H. de Balzac
[1à5]
|
Ecoles
TICE
collège
A. Camus
[1-2-3]
lycée
J. Dautet
[4-5]
|
Ville
A = grande ville / hétérogène
/ faible identité
Ville B = ville moyenne / homogène / forte
identité
Ecole(s) TICE = école avec implantation des
technologies de l'information et de la communication
dans l'enseignement
Ecole(s) Non-TICE = école sans implantation
des technologies de l'information et de la communication
dans l'enseignement
Niveaux = 1 correspond à la classe de cinquième,
5 à la classe de première
A
Paris, l'enquête a été effectuée
auprès de 273 élèves (123 en
lycée, 150 en collège), dans deux
établissements scolaires situés dans
deux quartiers très différents de
Paris, l'un périphérique et populaire,
l'autre socialement plus aisé. Chacun se
compose d'un collège accueillant des élèves
de la sixième à la troisième,
et d'un lycée pour des élèves
de la seconde à la terminale.
- Le
collège-lycée Camille Sée
est situé en plein cur du 15e arrondissement,
quartier où la population est de milieux
assez mélangés quoique plutôt
favorisés. Il accueille 1 400 élèves.
Les TICE y sont implantées depuis plusieurs
années, favorisant quelques projets pédagogiques,
notamment la création d'une classe multimédia
en 5e. L'équipement du collège
est identique à celui du lycée :
les accès à Internet sont possibles
depuis le centre de documentation et d'information
(CDI), une salle informatique et une salle de
technologie en réseau. Les élèves
ne peuvent pas aller sur Internet librement.
Ils y ont accès soit dans le cadre d'un
cours sur consigne de l'enseignant, soit au
CDI sur inscription et dans le cadre d'une recherche,
soit au sein du "Club Internet" sous la responsabilité
d'un enseignant.
- Le
collège-lycée Honoré de
Balzac est situé au nord du 17e arrondissement,
à la limite du boulevard périphérique.
Etablissement au recrutement multi-ethnique,
il accueille 1500 élèves issus
de milieux sociaux très diversifiés.
L'établissement possède très
peu d'équipement Internet : un seul
ordinateur avec accès à Internet,
dans une petite salle. Les élèves
n'y ont accès que dans le cadre d'un
club, et accompagnés d'un enseignant.
La
Rochelle est une agglomération de cent
mille habitants, située sur la façade
Atlantique, en région Poitou-Charentes, dans
l'académie de Poitiers, académie dynamique
quant au développement des technologies de
l'information et de la communication dans l'enseignement.
En 1997, l'académie s'est dotée d'un
programme de développement de l'usage des communications
électroniques, sous le nom de Rapsodie (Réseau
de l'Académie de Poitiers pour l'Optimisation
et le Développement des usages de l'Information
Electronique). Les lycées et collèges
ont ainsi tous accès à Internet.
L'enquête a été menée
dans quatre établissements rochelais, un
lycée et un collège en centre-ville,
un lycée et un collège en périphérie,
auprès de 251 élèves (123 en
lycée, 128 en collège). Ces établissements
sont raccordés à Internet via Numeris
(ISDN) et Renater et, pour trois d'entre eux, disposent
d'un parc informatique important, en réseau.
- Le
collège Eugène-Fromentin est un
établissement de centre ville qui accueille
950 élèves environ. Sa population
scolaire est très hétérogène:
si 56% des enfants appartiennent à des
milieux favorisés, voire très favorisés,
16% d'entre eux sont issus de familles de catégories
socioprofessionnelles reconnues en difficulté.
L'équipement informatique est en cours,
et l'établissement doit être doté
d'un réseau en fin d'année scolaire.
- Le
collège Albert-Camus est un petit établissement
classé en zone d'éducation prioritaire
(ZEP). Il accueille 300 élèves,
auxquels sajoutent 100 élèves
de section d'enseignements généraux
professionnels adaptés (SEGPA). La politique
de létablissement est tournée
vers plus de justice et de démocratie.
Cest ainsi que les classes sont résolument
hétérogènes et que des
actions sont mises en place pour faire vivre
la démocratie. L'équipement informatique
est important, et en réseau.
- Le
lycée Jean-Dautet, situé en plein
centre de La Rochelle, compte 1626 élèves
de milieu favorisé. Il dispose d'un bon
équipement informatique, en réseau.
Les TICE figurent dans les différents
axes du projet d'établissement et sont
considérées comme des outils s'intégrant
dans des projets pédagogiques cohérents,
disciplinaires voire interdisciplinaires.
- Le
lycée Léonce-Vieljeux, situé
en périphérie, se compose de deux
établissements: un lycée général
et technologique à forte dominante industrielle
(1174 élèves) et un petit lycée
professionnel (124 élèves). Les
élèves sont pour 50% d'entre eux
de milieu rural, et 50% de milieu sub-urbain
moyennement favorisé. Le parc informatique,
en réseau, est important. Le développement
des TICE est un des axes de la politique d'établissement,
avec pour but de favoriser l'épanouissement
des élèves.
Recueil des données
Les
données de l'enquête ont été
recueillies selon deux modalités: le passage
d'un questionnaire à l'ensemble de l'échantillon,
puis des entretiens individuels avec 23 élèves
de l'échantillon.
Le
questionnaire
Un
questionnaire anonyme, identifié seulement
par le prénom et la date de naissance de
l'élève, a été distribué
et rempli dans les classes entre novembre 1999 et
janvier 2000. 524 élèves y ont répondu
pendant le temps scolaire, dans le cadre d'une heure
de cours, après que l'un de leurs enseignants
le leur ait présenté en insistant
sur le fait que les résultats n'avaient aucune
incidence de type scolaire.
Répartition
des élèves par villes et par niveaux
Classes
|
Paris
|
La
Rochelle
|
Cinquième
Quatrième
Troisième
Seconde
Première
|
48
57
45
68
55
|
39
46
43
65
58
|
Total
|
273
|
251
|
Le
questionnaire était long (15 pages), mais
dans leur très grande majorité les
élèves l'ont rempli entièrement
et de façon cohérente. Bien entendu,
ce questionnaire ne recueille que ce que les jeunes
déclarent.
Une seule difficulté est apparue: dans un
premier temps, la ville de Carcassonne avait été
retenue à la place de La Rochelle et les
questionnaires distribués. Or, le retour
des questionnaires nous a montré que, malgré
des consignes identiques dans les deux villes, ils
avaient été passés dans des
conditions très différentes de celles
de Paris. Nous avons préféré
procéder à un autre passage dans une
ville différente, La Rochelle.
Les
résultats quantitatifs publiés dans
ce rapport sont le fruit de traitements statistiques
réalisés sur l'ensemble des données
recueillies au moyen du questionnaire. Les analyses
ont été effectuées à
partir des tableaux de fréquence et de croisement
de variables pour lesquels le test du Chi2 a été
calculé systématiquement.
Nous
disposions de quelques questions ouvertes, posées
en fonction d'objectifs différents.
La première question, "Pour toi, Internet,
c'est quoi?", devait permettre de saisir l'expression
spontanée des principales représentations
que les élèves ont d'Internet. Les
réponses ont fait lobjet dune
analyse lexicographique limitée à
la recherche doccurrences de termes. Les résultats
obtenus ont servi à éclairer les réponses
aux questions portant sur les représentations.
Les questions 37 et 38 portaient sur la catégorie
socioprofessionnelle des parents déduite de
leurs emplois déclarés par les jeunes.
Ces emplois semblent très mal connus des enfants
et l'imprécision du statut interdit toute classification
précise (parmi les réponses les plus
floues: "assurances", "usine de viandes", "préfecture
de police"
). Il est malheureusement sans intérêt
d'utiliser ces données en l'état.
Même
si le traitement des réponses faites aux
questions ouvertes ne peut être réalisé
systématiquement, elles pointent souvent
des difficultés de compréhension ou
un manque de précision de certains questions.
Par exemple, à la question 5q, "Si tu
fais régulièrement une activité
sur Internet qui nest pas mentionnée
ci-dessus, précise laquelle", un jeune répond:
"je télécharge des MP3", alors que
d'autres jeunes qui pratiquent la même activité
ont pu sélectionner les lignes k ("je regarde
des extraits vidéo ou jécoute
de la musique") ou l ("je télécharge
(download) des jeux vidéo ou des logiciels").
A la question 7, " Habituellement, quand je vais
sur Internet, je visite des sites de
", un
jeune a répondu qu'il allait sur des sites
"de roller", alors qu'il existait une catégorie
"Sports (foot, vélo, tennis, basket, course
automobile, etc.)".
Il
faut également noter que la variable "école
TICE" et "école non-TICE" n'a pas été
exploitée en tant que telle, si ce n'est
dans l'hétérogénéité
de l'échantillon quant à ses représentations.
Les établissements ont bien été
choisis en fonction de leur équipement informatique,
en prenant soin de ne pas sélectionner des
cas extrêmes (pas d'équipement du tout,
un équipement important et des utilisations
fréquentes). Cette ligne médiane n'a
pas permis de mettre au jour des différences
significatives dans les comportements et les représentations
des jeunes appartenant à l'une ou l'autre
catégorie d'établissements.
L'analyse
statistique de la variable âge a été
effectuée en tenant compte de deux données
distinctes :
- le niveau scolaire, selon que lélève
est inscrit en classe de cinquième, quatrième,
troisième, seconde ou première,
- l'année de naissance, selon que le
répondant est né " en 1984
et avant " ou " en 1985 et après ",
autrement dit selon qu'il est âgé de
15 ans et plus ou de 14 ans et moins.
Les traitements statistiques ont révélé
très peu de variations significatives relatives
aux niveaux scolaires. Cela peut s'expliquer soit
par l'absence de changements majeurs chez les jeunes
d'une année scolaire à la suivante,
soit par le fait que les échantillons -relativement
petits pour chacun des niveaux (de 87 à 133
individus)- n'ont pas permis de faire ressortir
des corrélations. En revanche, la segmentation
des répondants selon leur année de
naissance s'est révélée nettement
plus pertinente pour saisir les différences
liées à l'âge. Précisons
qu'il sera fait allusion aux différents niveaux
scolaires lorsque certaines particularités
associées à l'un ou l'autre des niveaux
auront été relevées.
Les
entretiens
Parmi
les 524 élèves, vingt-quatre ont été
sélectionnés pour une entrevue individuelle
selon les critères suivants:
- Une
première répartition a été
effectuée selon le niveau scolaire. Seuls
trois niveaux sur cinq ont été retenus
(classes de cinquième, troisième et
première), permettant un échantillonnage
réparti entre les plus jeunes de première
année, la troisième année intermédiaire
et les plus âgés de dernière
année. Huit élèves par niveau
ont ainsi été rencontrés (8
élèves x 3 niveaux = 24 entrevues).
- Une seconde répartition a été
effectuée en fonction de la relation de l'élève
à Internet, selon quatre catégories:
1. usager régulier d'Internet disposant d'un
branchement à la maison,
2. usager régulier ne disposant pas de branchement
à la maison,
3. usager faible,
4. usager nul.
Un jeune est considéré usager régulier
quand il déclare utiliser assez souvent ou
très souvent Internet (plusieurs fois par
semaine); un usager faible renvoie à
un usage déclaré comme une fois ou
deux (ou à l'occasion); un usager nul
désigne un jeune ayant déclaré
n'avoir jamais utilisé lui-même Internet.
Dans la mesure où l'intérêt
de la recherche porte sur la représentation,
l'usage et l'appropriation, nous avons privilégié
les usagers réguliers afin qu'ils puissent
rendre compte de leur pratique dInternet,
particulièrement à la maison, puisque
c'est là qu'ont lieu les pratiques les plus
diversifiées. Ainsi, les huit élèves
retenus par niveau sont répartis comme suit:
quatre usagers réguliers maison, deux usagers
réguliers hors maison, un usager faible,
un usager nul.
- Sans être systématique, le choix
final des élèves interviewés
s'est fait en fonction de la ville, l'école
et le sexe.
23
entretiens ont finalement été réalisés
individuellement dans les locaux des établissements,
sur le temps scolaire, en avril et mai 2000. Ils
ont été menés, dépouillés
et interprétés par les deux mêmes
personnes qui ont analysé les questionnaires
de façon à bien entrer en résonance
avec les questionnaires.
D'une durée de 40 à 60 minutes chacun,
ils ont été menés à
partir du questionnaire de chaque élève
et ont visé à approfondir les trois
dimensions à létude (représentation,
utilisation, appropriation) en fonction des lieux
dutilisation (maison, école, ailleurs).
Des précisions ont ainsi été
recueillies sur le contexte familial de lélève,
ses goûts, loccupation de ses temps
libres, ses aspirations, le degré factuel
de sa connaissance et de sa pratique dInternet,
les caractéristiques de cette pratique quand
elle a lieu (description dune séance
type), lévaluation que lélève
pouvait porter sur ses différentes activités
(télévision, lecture, téléphone,
rencontres damis, sports, etc.) en regard
dInternet, lopinion que lélève
pouvait émettre à propos dInternet
à partir de son expérience du média.
Les 23 élèves se sont prêtés
volontiers à ces entretiens, à l'unique
exception d'un 24e élève qui ne s'est
pas présenté et n'a pas donné
d'explication à son absence.
Le
décalage entre le passage des questionnaires
(novembre 1999 - janvier 2000) et les entretiens
(avril - mai 2000) nous a permis d'observer
que ces quelques mois avaient suffi pour accroître
la connaissance et les usages d'Internet chez ces
adolescents.
Organisation de la présentation des résultats
De
concert avec nos partenaires européens, nous
avons opté pour une présentation combinée
de lanalyse du questionnaire et des entrevues.
Car il sagit bien là dune démarche
dinvestigation qui se veut complémentaire.
Dans les pages qui suivent, nous proposerons tout
d'abord les caractéristiques du groupe
de répondants en fonction des variables socio-démographiques,
du taux d'équipement domestique en matière
de micro-ordinateur et de connexion à Internet.
Nous exposerons ensuite les résultats de
l'enquête. Nous partirons des représentations
des jeunes vis à vis d'Internet, puis nous
aborderons les contextes d'utilisation que les jeunes
déclarent en avoir, dans le cadre familial
et scolaire principalement. Nous terminerons avec
les usages déclarés hors cadre scolaire.
Ces
résultats d'enquête devraient fournir
des éléments de réponse aux grandes
questions que nous nous sommes posées en entreprenant
cette recherche: comment sétablit la
relation entre les jeunes et Internet ? Dans
quel contexte les jeunes utilisent-ils Internet ?
Comment sen servent-ils ? Que font-ils ?
Qu'en pensent-ils ? Comment envisagent-ils lavenir
dInternet ? De quelle manière sapproprient-ils
cette nouvelle technologie ? De quelle manière
Internet vient-il modifier leurs pratiques culturelles,
leurs habitudes de loisirs, les rapports avec leurs
parents et leurs pairs ? Nous tenterons de répondre
à ces questions en proposant les faits saillants
ressortant de cette enquête.

1 - Internet en France et dans le système éducatif
2 - Les objectifs de la recherche
3 - Remarques méthodologiques
4 - Caractéristiques de l'échantillon
4
- CARACTÉRISTIQUES
DE L'ÉCHANTILLON |
Variables socio-démographiques
Les
jeunes ayant participé à l'enquête
ont entre 12 et 17 ans. Ils se répartissent
de façon équivalente entre les deux
villes (Paris et La Rochelle), mais on note quelques
déséquilibres:
- Les
garçons sont sur-représentés.
Cela est dû surtout au lycée Vieljeux
de La Rochelle, établissement possédant
des sections techniques dont sont issus les élèves
de l'échantillon (91% de garçons).
En revanche, hormis cet établissement, les
garçons sont globalement sous-représentés
à La Rochelle.
- Les adolescents de 15 ans et plus sont plus
nombreux que ceux de moins de 15 ans.
- Les groupes classes reflètent la
réalité des établissements
scolaires français, où les classes
de lycées sont plus chargées que celles
de collèges.
- Rappelons que la catégorie socioprofessionnelle
des parents, déduite des emplois déclarés
par les jeunes, n'est que très rarement exploitable
étant donné l'imprécision des
réponses aux questions ouvertes. Toutefois,
nous constatons que les élèves proviennent
de milieux sociaux différents. Couplées
à la variable géographique, ces indications
révèlent un échantillon varié,
qui permet de dégager des constantes susceptibles
d'être mises en parallèle avec les résultats
des enquêtes des six pays partenaires.
Répartition
par ville
Paris
|
52%
|
La
Rochelle
|
48%
|
Répartition
par sexes
Répartition
par âge
Né
en 1983 et avant
|
30%
|
|
15
ans et plus
|
55%
|
Né
en 1984
|
25%
|
Né
en 1985
|
17%
|
Moins
de 15 ans
|
45%
|
Né
en 1986
|
15%
|
Né
en 1987 et après
|
13%
|
Répartition
par niveau scolaire
Cinquième
|
17%
|
Quatrième
|
20%
|
Troisième
|
17%
|
Seconde
|
25%
|
Première
|
22%
|
Le
milieu familial
Ton
père travaille-t-il ?
Oui
|
83%
|
Non
|
8%
|
Je
ne sais pas
|
9%
|
Ta
mère travaille-t-elle ?
Oui
|
68%
|
Non
|
28%
|
Je
ne sais pas
|
4%
|
L'équipement informatique de la maison et
son utilisation
Deux-tiers
des jeunes (68%) déclarent avoir accès
à un ordinateur à la maison. La grande
majorité d'entre eux s'en sert régulièrement
(69% l'utilisent souvent ou très souvent),
qu'il soit ou non branché à Internet.
On
constate peu de différences selon le sexe,
aucune en matière de taux d'équipement,
et une légère pour la fréquence
d'usage. Comme on s'y attend et comme l'ont montré
de nombreuses recherches, les garçons sont
plus nombreux que les filles à utiliser régulièrement
un ordinateur (74% l'utilisent souvent ou très
souvent contre 63% des filles). Dans le cadre de
cette enquête, nous verrons si Internet modifie
ce clivage traditionnel filles-garçons, comment
se manifestent les différences dans les pratiques
et dans les représentations des adolescents
et des adolescentes vis à vis dInternet.
On
constate également un usage plus ou moins
fréquent de l'ordinateur familial selon le
niveau scolaire. Ainsi, l'utilisation régulière
décroît progressivement de la cinquième
à la troisième (de 73% à 60%),
pour remonter fortement au lycée (74%). Notons
quil sagit peut-être ici dun
simple effet déclaratif. Toutefois, comme
nous le verrons par la suite, les collégiens
les plus jeunes se distinguent également
par une utilisation nettement plus marquée
des jeux sur Internet, et les lycéens par
une utilisation croissante pour leurs travaux scolaires.
Il est donc possible que cette courbe d'utilisation
de l'ordinateur soit liée à celle
d'Internet.
Toujours
sur le plan des usages et au risque de décevoir
certains parents, il semble que les adolescents
se servent de l'ordinateur familial plutôt
dans le cadre de leurs loisirs que pour une activité
liée à un apprentissage. En effet,
si 41% d'entre eux disent en faire une utilisation
mixte (à la fois dans le cadre de leurs loisirs
et pour faire leurs travaux scolaires), 50% reconnaissent
s'en servir principalement comme d'une activité
de loisir et 6% seulement pour des activités
directement liées à leurs travaux
scolaires. On observe par ailleurs une utilisation
plus ludique de l'ordinateur familial chez les garçons
(56%) que chez les filles (42%). Nous verrons par
la suite comment ces comportements et ces motivations
évoluent lorsque l'ordinateur est connecté
à Internet.
Avez-vous
un ordinateur à la maison (n=524)
Ont
un ordinateur à la maison
|
68%
|
N'ont
pas d'ordinateur à la maison
|
30%
|
Ne
se prononcent pas
|
2%
|
A
la maison, j'utilise un ordinateur
(n=355)
Jamais
|
2%
|
|
30%
|
Rarement
|
7%
|
|
A
l'occasion
|
21%
|
|
Souvent
|
37%
|
69%
|
Très
souvent
|
32%
|
Ne
se prononcent pas
|
1%
|
Qui
se sert le plus de l'ordinateur à la maison ?
Les
enfants
|
50%
|
Les
parents
|
17%
|
Autant
les parents que les enfants
|
32%
|
Ne
se prononcent pas
|
1%
|
Quand
j'utilise l'ordinateur à la maison, c'est
Surtout
pour mes loisirs
|
50%
|
Surtout
pour faire mes travaux scolaires
|
6%
|
Autant
pour mes travaux scolaires que mes loisirs
|
41%
|
Ne
se prononcent pas
|
3%
|
A
la maison, où se trouve l'ordinateur ?*
Pièce
qui sert de bureau
|
32%
|
|
|
Salon,
salle de séjour
|
26%
|
|
Chambre
de mes parents
|
10%
|
|
Chambre
de mes frères/surs
|
10%
|
41%
|
Ma
chambre
|
31%
|
|
Ne
se prononcent pas
|
4%
|
|
* Total supérieur à 100% puisqu'il peut
y avoir plusieurs ordinateurs dans la maison
Pour
conclure, retenons que selon les résultats
fournis par le questionnaire, le micro-ordinateur
est présent dans presque sept foyers sur
dix de notre échantillon, que la majorité
des adolescents l'utilise régulièrement,
et que les usages qu'ils en font semblent s'apparenter
davantage à une activité de loisir
qu'à une activité "sérieuse"
telle que la réalisation des travaux scolaires,
comme nous lont confirmé de vive voix
les jeunes que nous avons interrogés.
L'utilisation d'Internet
Composition
de l'échantillon et de ses sous-échantillons
|
%
|
Nbre
élèves
|
|
filles
|
garçons
|
15
ans et plus
|
moins
15 ans
|
Paris
|
La
Rochelle
|
Total
échantillon
|
100%
|
524
|
|
45%
|
55%
|
55%
|
45%
|
52%
|
48%
|
Déclarent
avoir déjà utilisé Internet,
eux-mêmes, "1 ou 2 fois" ou "plusieurs
fois"
|
72%
|
378
|
|
41%
|
59%
|
56%
|
44%
|
50%
|
50%
|
Déclarent
avoir déjà utilisé Internet
"assez souvent (régulièrement)"
et "très souvent (plusieurs fois par
semaine)"
|
32%
|
170
|
|
36%
|
64%
|
56%
|
44%
|
58%
|
42%
|
Déclarent
avoir Internet à la maison, qu'ils
habitent dans un ou plusieurs domiciles
|
34%
|
177
|
|
41%
|
59%
|
58%
|
42%
|
57%
|
43%
|
Déclarent
avoir Internet à la maison et l'utiliser
|
33%
|
172
|
|
42%
|
58%
|
59%
|
41%
|
57%
|
43%
|
Déclarent
avoir déjà utilisé Internet
à l'école
|
43%
|
225
|
|
42%
|
58%
|
56%
|
44%
|
46%
|
54%
|
Déclarent
avoir utilisé Internet à l'école
depuis septembre 1999 "rarement", "à
l'occasion", "souvent" ou "très souvent"
|
30%
|
157
|
|
32%
|
68%
|
52%
|
48%
|
42%
|
58%
|
L'échantillon
retenu pour cette enquête ne se voulait pas
représentatif de la population française
des collégiens et lycéens (12-17 ans).
Et de fait, il ne l'est pas.
Il ressort ainsi que 34% des jeunes sélectionnés
déclarent avoir Internet à la maison.
Ce chiffre est bien supérieur au taux d'équipement
cité habituellement en France pour lépoque :
selon le baromètre Multimédia Médiamétrie/ISL,
seuls 5,9% des foyers disposaient d'une connexion
à Internet en décembre 1999.
Il est peu probable que cet écart s'explique
par le simple fait que, dans leur déclaration,
les jeunes confondent le fait d'avoir Internet avec
celui d'avoir un ordinateur. En effet, s'ils sont
un tiers à dire avoir Internet à la
maison, ils sont deux tiers à déclarer
avoir un ordinateur.
La
sur-représentation des élèves
ayant Internet à la maison et de ceux qui
déclarent l'avoir utilisé plus d'une
fois (42%) peut s'expliquer de différentes
manières:
- La moitié de l'échantillon (52%)
est composée d'élèves parisiens.
Or, différentes enquêtes montrent que
l'accès à Internet est plus répandu
lorsque le chef de famille habite en Ile-de-France.
- L'autre moitié de l'échantillon
habite à La Rochelle, une ville de 100 000
habitants particulièrement dynamique dans
ce domaine.
- Les foyers auxquels appartiennent les élèves
se situent dans une tranche de population plus équipée
que la moyenne (les adultes de 25 à 49 ans
représentent 55% des personnes ayant Internet
chez elles, pourcentage encore majoré s'ils
ont un ou plusieurs enfants).
- La moitié de l'échantillon appartient
à un milieu social plus aisé que la
moyenne.
- Bien entendu, certains élèves ont
pu déclarer avoir Internet à la maison
pour se conformer à une attente supposée
des enquêteurs. Toutefois, la cohérence
des réponses à l'ensemble du questionnaire
ne permet pas de l'affirmer.
Cette
sur-représentation témoigne aussi
du choix des enquêteurs français au
vu de l'objet de l'enquête. S'il s'agit de
mieux connaître les représentations
que les collégiens et les lycéens
ont d'Internet, qu'ils en soient utilisateurs ou
non, il s'agit également de mieux cerner
leur utilisation et leur appropriation à
la maison et à l'école. Doù
limportance de disposer dun pourcentage
significatif délèves au contact
avec Internet pour savoir ce qu'ils en font.
On
note que le facteur âge modifie peu la composition
des sous-échantillons. En revanche, la répartition
filles-garçons et Paris-La Rochelle apporte
quelques premiers enseignements :
- Les garçons, et dans une moindre mesure
les Parisiens, se déclarent de plus grands
utilisateurs d'Internet,
- Les Rochelais utilisent plus Internet à
l'école que les Parisiens.
- Plus les élèves interrogés
sont âgés, plus ils répondent
positivement.

Suite
du rapport de recherche
© CLEMI, mars 2001
Chapitre
2: les représentations d'Internet
Chapitre 3: les
utilisations d'Internet
Chapitre 4: les usages d'Internet
Retour
au sommaire complet

|